Odes – Livre III

Les magnifiques vers d'Horace sont traduits par les participants des forums de langues anciennes.
 

Ad Lydiam

Ad Lydiam

— Donec gratus eram tibi
Nec quisquam potior bracchia candidae
Ceruici iuuenis dabat,
Persarum uigui rege beatior.

— Donec non alia magis
Arsisti neque erat Lydia post Chloen,
Multi Lydia nominis,
Romana uigui clarior Ilia.

— Me nunc Thressa Chloe regit,
Dulcis docta modos et citharae sciens,
Pro qua non metuam mori,
Si parcent animae fata superstiti.

— Me torret face mutua
Thurini Calais filius Ornyti,
Pro quo bis patiar mori,
Si parcent puero fata superstiti.

— Quid si prisca redit Venus
Diductosque iugo cogit aeneo,
Si flaua excutitur Chloe
Reiectaeque patet ianua Lydiae ?

— Quamquam sidere pulchrior
Ille est, tu leuior cortice et inprobo
Iracundior Hadria
Tecum uiuere amem, tecum obeam lubens.

Horace, Odes, III, IX, en glyconiques et asclépiades mineurs

À Lydie

— Tant que pour toi j'avais des charmes
Que nul jeune rival, préféré, n'entourait
Ton cou d'albâtre de ses bras,
J'ai vécu plus heureux que le roi de la Perse.

— Tant que nulle autre plus que moi
Ne t'enflamma, tant que Lydie passait Chloé,
Moi, Lydie, mille fois nommée,
J'ai vécu plus connue qu'Ilia la Romaine.

— Chloé la Thrace me gouverne,
Qui sait les doux accords et joue de la cithare ;
J'affronterais la mort pour elle
Si par là les Destins épargnaient cette vie.

— D'un feu mutuel me consume
Calaïs, digne fils d'Ornytus le Thurien,
Et je mourrais deux fois pour lui
Si par là les Destins épargnaient cet enfant.

— Mais si revient l'amour d'antan
Remettre au joug d'airain nos deux cœurs séparés,
Si je chasse Chloé la blonde
Et si j'ouvre ma porte à Lydie repoussée ?

— Même s'il est plus beau qu'un astre,
Et même si tu es plus léger que le liège,
Plus violent que l'âpre Hadria,
Avec toi je veux vivre et mourir avec toi.

Traduction de Henri Tournier

 

Ad Neobulen

Ad Neobulen

Miserarum est neque amori dare ludum neque dulci
     Mala uino lauere aut exanimari
     Metuentis patruae uerbera linguae.

Tibi qualum Cytherae puer ales, tibi telas
     Operosaeque Mineruae studium aufert,
     Neobule, Liparaei nitor Hebri,

Simul unctos Tiberinis umeros lauit in undis,
     Eques ipso melior Bellerophonte,
     Neque pugno neque segni pede uictus ;

Catus idem per apertum fugientis agitato
     Grege ceruos iaculari et celer arto
     Latitantem fruticeto excipere aprum.

Horace, Odes, III, XII, en ioniques mineurs

À Néobule

Celles-là ont un triste sort qui sont privées du jeu d'amour,
     Qui ne peuvent noyer leurs chagrins dans le vin,
     Qui tremblent à la voix d'un sévère tuteur !

L'enfant ailé de Cythéré s'est emparé de ta corbeille,
     Tu oublies de tisser comme tissait Minerve
     En voyant la splendeur d'Hébrus de Lipara

Qui baigne dans les eaux du Tibre une épaule luisante d'huile,
     Bien meilleur cavalier que Bellérophon même,
     Jusqu'ici victorieux au ceste et à la course,

Qui sait atteindre de ses traits la harde des cerfs fugitive
     À terrain découvert, et surprendre soudain
     Le sanglier caché dans un épais taillis.

Traduction de Henri Tournier

 

Ad fontem Bandusinum

Ad fontem Bandusinum

O fons Bandusiae, splendidior uitro,
Dulci digne mero non sine floribus,
          Cras donaberis haedo,
     Cui frons turgida cornibus

Primis et uenerem et proelia destinat.
Frustra : nam gelidos inficiet tibi
          Rubro sanguine riuos
     Lasciui suboles gregis.

Te flagrantris atrox hora Caniculae
Nescit tangere, tu frigus amabile
          Fessis uomere tauris
     Praebes et pecori uago.

Fies nobilium tu quoque fontium
Me dicente cauis impositam ilicem
          Saxis, unde loquaces
     Lymphae desiliunt tuae.

Horace, Odes, III, XIII, en strophes asclépiades B

À la source de Bandusie

Source de Bandusie, plus claire qu'un cristal,
Digne d'un doux nectar accompagné de fleurs,
     Tu recevras demain l'offrande
     D'un chevreau dont naissent les cornes

En présage déjà d'amoureuses querelles.
En vain : car, il teindra de son sang écarlate
     Le cours de tes ondes glacées,
     Cet enfant d'un troupeau folâtre.

La terrible saison de canicule ardente
Ne saurait t'affecter quand ta fraîcheur aimable
     S'offre au taureau las de l'araire,
     Comme à l'errance du troupeau.

Toi-même tu seras une source célèbre
Car je chante l'yeuse agrippée au rocher
     De l'humble grotte d'où jaillit
     Le bavardage de tes ondes.

Traduction de Henri Tournier

 

Ad Musam

Ad Musam

Exegi monumentum aere perennius
Regalique situ pyramidum altius,
Quod non imber edax, non Aquilo inpotens
Possit diruere aut innumerabilis
Annorum series et fuga temporum.
Non omnis moriar multaque pars mei
Vitabit Libitinam ; usque ego postera
Crescam laude recens, dum Capitolium
Scandet cum tacita uirgine pontifex.
Dicar, qua uiolens obstrepit Aufidus
Et qua pauper aquae Daunus agrestium
Regnauit populorum, ex humili potens
Princeps Aeolium carmen ad Italos
Deduxisse modos. Sume superbiam
Quaesitam meritis et mihi Delphica
Lauro cinge uolens, Melpomene, comam.

Horace, Odes, III, XXX, en asclépiades mineurs

À sa Muse

L'œuvre que j'ai fait passera l'airain,
Plus grand que les pyramides des rois ;
Rien ne le vaincra ; ni la pluie qui ronge,
Ni l'Aquilon vif, ni les ans qui passent
Et le temps qui fuit. Je ne mourrai pas
Tout entier; mon âme aura échappé
À Libitinè ; la Postérité
Me rendra plus grand, tandis que les prêtres
Monteront au temple avec une vierge.
On dira qu'ici, où mugit l'Aufide,
Où Daunus régna sur la terre aride
Et des paysans, moi, parti de rien,
Le premier, j'ai fait de chants Éoliens
Des vers Italiens. Conçois de l'orgueil
Légitimement, ô ma Melpomène,
Et couronne-moi du laurier de Delphes.

Traduction de Henri Tournier

 

 

↑ Retour au haut de cette page

Pages connexes

← Retour au menu précédent

 


Les traductions et discussions qui sont proposées dans les Jardins de Lucullus font l'objet d'un travail commun et de débats sur les forums Usenet ; les discussions originelles sont archivées sur Google Groups. Les pseudonymes ou noms réels cités sur cette page sont ceux de certains des participants, que je remercie ici pour leur perpétuelle sympathie qui confère sans cesse aux forums une atmosphère chaleureuse.