Ad Lydiam
— Donec gratus eram tibi
Nec quisquam potior bracchia candidae
Ceruici iuuenis dabat,
Persarum uigui rege beatior.
— Donec non alia magis
Arsisti neque erat Lydia post Chloen,
Multi Lydia nominis,
Romana uigui clarior Ilia.
— Me nunc Thressa Chloe regit,
Dulcis docta modos et citharae sciens,
Pro qua non metuam mori,
Si parcent animae fata superstiti.
— Me torret face mutua
Thurini Calais filius Ornyti,
Pro quo bis patiar mori,
Si parcent puero fata superstiti.
— Quid si prisca redit Venus
Diductosque iugo cogit aeneo,
Si flaua excutitur Chloe
Reiectaeque patet ianua Lydiae ?
— Quamquam sidere pulchrior
Ille est, tu leuior cortice et inprobo
Iracundior Hadria
Tecum uiuere amem, tecum obeam lubens.
Horace, Odes, III, IX, en glyconiques et asclépiades mineurs
À Lydie
— Tant que pour toi j'avais des charmes
Que nul jeune rival, préféré, n'entourait
Ton cou d'albâtre de ses bras,
J'ai vécu plus heureux que le roi de la Perse.
— Tant que nulle autre plus que moi
Ne t'enflamma, tant que Lydie passait Chloé,
Moi, Lydie, mille fois nommée,
J'ai vécu plus connue qu'Ilia la Romaine.
— Chloé la Thrace me gouverne,
Qui sait les doux accords et joue de la cithare ;
J'affronterais la mort pour elle
Si par là les Destins épargnaient cette vie.
— D'un feu mutuel me consume
Calaïs, digne fils d'Ornytus le Thurien,
Et je mourrais deux fois pour lui
Si par là les Destins épargnaient cet enfant.
— Mais si revient l'amour d'antan
Remettre au joug d'airain nos deux cœurs séparés,
Si je chasse Chloé la blonde
Et si j'ouvre ma porte à Lydie repoussée ?
— Même s'il est plus beau qu'un astre,
Et même si tu es plus léger que le liège,
Plus violent que l'âpre Hadria,
Avec toi je veux vivre et mourir avec toi.
Traduction de Henri Tournier
Ad Neobulen
Miserarum est neque amori dare ludum neque dulci
Mala uino lauere aut exanimari
Metuentis patruae uerbera linguae.
Tibi qualum Cytherae puer ales, tibi telas
Operosaeque Mineruae studium aufert,
Neobule, Liparaei nitor Hebri,
Simul unctos Tiberinis umeros lauit in undis,
Eques ipso melior Bellerophonte,
Neque pugno neque segni pede uictus ;
Catus idem per apertum fugientis agitato
Grege ceruos iaculari et celer arto
Latitantem fruticeto excipere aprum.
Horace, Odes, III, XII, en ioniques mineurs
À Néobule
Celles-là ont un triste sort qui sont privées du jeu d'amour,
Qui ne peuvent noyer leurs chagrins dans le vin,
Qui tremblent à la voix d'un sévère tuteur !
L'enfant ailé de Cythéré s'est emparé de ta corbeille,
Tu oublies de tisser comme tissait Minerve
En voyant la splendeur d'Hébrus de Lipara
Qui baigne dans les eaux du Tibre une épaule luisante d'huile,
Bien meilleur cavalier que Bellérophon même,
Jusqu'ici victorieux au ceste et à la course,
Qui sait atteindre de ses traits la harde des cerfs fugitive
À terrain découvert, et surprendre soudain
Le sanglier caché dans un épais taillis.
Traduction de Henri Tournier
Ad fontem Bandusinum
O fons Bandusiae, splendidior uitro,
Dulci digne mero non sine floribus,
Cras donaberis haedo,
Cui frons turgida cornibus
Primis et uenerem et proelia destinat.
Frustra : nam gelidos inficiet tibi
Rubro sanguine riuos
Lasciui suboles gregis.
Te flagrantris atrox hora Caniculae
Nescit tangere, tu frigus amabile
Fessis uomere tauris
Praebes et pecori uago.
Fies nobilium tu quoque fontium
Me dicente cauis impositam ilicem
Saxis, unde loquaces
Lymphae desiliunt tuae.
Horace, Odes, III, XIII, en strophes asclépiades B
À la source de Bandusie
Source de Bandusie, plus claire qu'un cristal,
Digne d'un doux nectar accompagné de fleurs,
Tu recevras demain l'offrande
D'un chevreau dont naissent les cornes
En présage déjà d'amoureuses querelles.
En vain : car, il teindra de son sang écarlate
Le cours de tes ondes glacées,
Cet enfant d'un troupeau folâtre.
La terrible saison de canicule ardente
Ne saurait t'affecter quand ta fraîcheur aimable
S'offre au taureau las de l'araire,
Comme à l'errance du troupeau.
Toi-même tu seras une source célèbre
Car je chante l'yeuse agrippée au rocher
De l'humble grotte d'où jaillit
Le bavardage de tes ondes.
Traduction de Henri Tournier
Ad Musam
Exegi monumentum aere perennius
Regalique situ pyramidum altius,
Quod non imber edax, non Aquilo inpotens
Possit diruere aut innumerabilis
Annorum series et fuga temporum.
Non omnis moriar multaque pars mei
Vitabit Libitinam ; usque ego postera
Crescam laude recens, dum Capitolium
Scandet cum tacita uirgine pontifex.
Dicar, qua uiolens obstrepit Aufidus
Et qua pauper aquae Daunus agrestium
Regnauit populorum, ex humili potens
Princeps Aeolium carmen ad Italos
Deduxisse modos. Sume superbiam
Quaesitam meritis et mihi Delphica
Lauro cinge uolens, Melpomene, comam.
Horace, Odes, III, XXX, en asclépiades mineurs
À sa Muse
L'œuvre que j'ai fait passera l'airain,
Plus grand que les pyramides des rois ;
Rien ne le vaincra ; ni la pluie qui ronge,
Ni l'Aquilon vif, ni les ans qui passent
Et le temps qui fuit. Je ne mourrai pas
Tout entier; mon âme aura échappé
À Libitinè ; la Postérité
Me rendra plus grand, tandis que les prêtres
Monteront au temple avec une vierge.
On dira qu'ici, où mugit l'Aufide,
Où Daunus régna sur la terre aride
Et des paysans, moi, parti de rien,
Le premier, j'ai fait de chants Éoliens
Des vers Italiens. Conçois de l'orgueil
Légitimement, ô ma Melpomène,
Et couronne-moi du laurier de Delphes.
Traduction de Henri Tournier
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