Chez Phyllis

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Le mythe de Phyllis et Démophon est repris par Ovide dans ses Héroïdes (II), mais ce nom est très présent dans la littérature, avec entre autres Properce, Virgile – Églogues VII et X –, Calpurnius, Pline l'Ancien, Hygin, Suétone – à propos d'un personnage réel cependant –, et enfin Servius, commentant Virgile.
C'est un nom fréquemment donné dans la poésie galante à la femme que l'on célèbre. Au XVIIe siècle, Voiture écrivit ainsi dans « L'Astre du jour » :

« Mais auprès de Philis on le prit pour l'Aurore
Et l'on crut que Philis était l'astre du jour. »

Martial a quant à lui décidément tenu à faire de Phyllis un sacré numéro !

Chez Phyllis

Cum duo uenissent ad Phyllida mane fututum
Et nudam cuperet sumere uterque prior,
Promisit pariter se Phyllis utrique daturam,
Et dedit : ille pedem sustulit, hic tunicam.

Martial, LXXXI, 10

Arrivés un matin chez Phyllis pour baiser,
Et chacun désirant d'abord la prendre nue,
Phyllis promit aux deux en corps de se donner,
Et se donna : l'un eut le pied, l'autre le cul.

Traduction de Iulius

 

Chez Phyllis

Cum duo uenissent ad Phyllida mane fututum
Et nudam cuperet sumere uterque prior,
Promisit pariter se Phyllis utrique daturam,
Et dedit : ille pedem sustulit, hic tunicam.

Martial, LXXXI, 10

Tôt ils vinrent à deux chez Phyllis pour baiser
Mais chacun désirait la prendre le premier,
Aux deux Phyllis promit un plaisir identique ;
Tenu ! L'un prit la jambe et l'autre la tunique.

Traduction de Caligula

 

Chez Phyllis

Cum duo uenissent ad Phyllida mane fututum
Et nudam cuperet sumere uterque prior,
Promisit pariter se Phyllis utrique daturam,
Et dedit : ille pedem sustulit, hic tunicam.

Martial, LXXXI, 10

De bon matin venus chez Phyllis pour la foutre,
Chacun d'abord voulait la prendre nue.
Aux deux Phyllis promit qu'elle se donnait toute.
De fait : l'un prit son pied, l'autre son cul.

Traduction de Henri Tournier

 

Aux alexandrins dont les rimes sont soit croisées chez Iulius, soit suivies chez Caligula, Henri Tournier oppose ses distiques alexandrin-décasyllabe pour traduire les distiques élégiaques de Martial.
De surcroît, Henri s'est aussi amusé à y rajouter des rimes internes, ce qui fait que nous pourrions aussi présenter le poème avec la disposition suivante, pour le moins suggestive...

De bon matin venus chez Phyllis pour la foutre,

Chacun d'abord voulait
La prendre nue.

Aux deux Phyllis promit qu'elle se donnait toute.

De fait : l'un prit son pied,
L'autre son cul.

 

Pour la tunique, c'est un « vêtement de dessous des Romains à l'usage des deux sexes » selon le Gaffiot.
Tunicam tollere signifie « soulever la tunique » et pedem tollere [ad concubitum] a pour sens « aller se coucher ».

Néanmoins, en consultant le Ad Atticum de Cicéron (II, 1, 3), l'affaire est plus complexe : quelqu'un se plaint à Cicéron de sa sœur, à qui il est apparemment marié :

— Sed soror, [...] unum mihi solum pedem dat.
— Noli inquam de uno pede sororis queri ; licet etiam alterum tollas.

Ce qui donne en français :

— Mais ta sœur [...] ne me donne qu'un pied.
— Ne te plains pas, dis-je, du pied unique de ma sœur. Tu n'as qu'à prendre l'autre aussi.

C'est ce que le Gaffiot appelle pudiquement pedes tollere. Il y a sûrement là-dessous des realia qui nous échappent...

 

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