Valeur de la monnaie romaine

La connaissance d'éléments de civilisation antique permet de mieux comprendre la culture antique et par là même, la nôtre.
 

Il faut déjà connaître les équivalences des monnaies entre elles. Sous Tibère, 1 obole vaut 2 as ; 1 sesterce (bronze) vaut 4 as (bronze) ; 1 drachme vaut 3 sesterces ; 1 denier (argent) vaut 4 sesterces (bronze) ; 1 aureus (or) vaut 25 deniers (argent) ; 1 mine vaut 100 drachmes (soit 75 deniers) ; 1 talent vaut 60 mines (soit 180 aurei).

Sous Tibère, on frappait 40 aurei dans une livre romaine (327 grammes) d'or donc 1 aureus pesait 8 grammes d'or. Puis on peut évaluer à la valeur de l'or d'aujourd'hui pour se donner une idée. L'or au kilo vaut en avril 2000 environ 9 500 euros, soit 62 250 francs, ce qui nous fait un aureus à 76 euros (500 francs). Comme 1 aureus vaut 100 sesterces, 1 sesterce vaut 0,76 euro (5 francs). Bien sûr, tout cela est théorique puisqu'il faut aussi voir le pouvoir d'achat de la monnaie.

La journée d'un ouvrier valait 1 denier. Une journée de travail à Rome, pour tous, allait de l'aube à midi et, vu le nombre de jours fériés, un ouvrier romain travaillait environ 250 jours par an. Un ouvrier devait donc vivre un an avec à peu près 250 deniers (soit 1 000 sesterces = 760 euros) ; de là on devine que les prix n'étaient pas les nôtres. La solde d'un légionnaire au temps de Tibère s'élevait à 225 deniers par an (soit 680 euros par an). De fait, un légionnaire gagnait un peu moins qu'un ouvrier, en un an. Un maître d'école recevait 2 sesterces (1,5 euro) par mois et par élève. Avec une classe de 30 élèves, un maître d'école pouvait compter sur 60 sesterces par mois, soit 15 deniers. S'il enseignait sur 10 mois, il gagnait par an 150 deniers, soit 450 euros, une misère par rapport au soldat et à l'ouvrier. Après, tout est histoire de prix.

À Pompéi en 79 après J.-C., 6,503 kg de blé = 3 sesterces = 2,3 euros. Si 225 grammes de blé suffisent par jour pour 1 personne sur une année, soit 821,25 kg, elle dépensera 379 sesterces, soit 94,75 deniers ou 290 euros par an sur son budget. Plus du quart.

1 litre de vin ordinaire = 1 sesterce = 0,76 euro. 1 tunique = 15 sesterces = 11,2 euros (d'après La V. Q à Pompéi de Robert Étienne).

En fait, dans l'antiquité, la plupart des gens vivait chichement et un salaire ne devait pas nourrir une famille bien nombreuse. D'où l'importance du clientélisme et de la sportule quotidienne. Comme il n'y avait pas de demi-mesure, un sénateur, lui, roulait sur l'or. Pour être sénateur, il fallait déclarer un patrimoine d'un million de sesterces par an, soit 760 000 euros. On voit tout de suite la différence !

Comment compte-t-on ?

Pour les sesterces, la règle est que le mot sestertium (à l'origine le génitif pluriel de sestertius pour milia sestertium comme milia hominum) est pris pour un neutre équivalent à 1 000 sestertii.
1 sestertius = 1 sesterce.
1 sestertium = 1 000 sesterces.
Le symbole monétaire était HS (pour IIS, c'est-à-dire 2,5 as).

Remarque amusante : les deux lettres assemblées forment le sigle du dollar.

Ainsi, tria sestertia = tria milia sestertium = 3000 HS.

Toujours pour la monnaie, afin de compter les millions, on utilise les adverbes multiplicatifs. Énormément d'exemples chez Suétone.
Centies sestertium (= 10 millions de sesterces) : il faut comprendre en toutes lettres centies centena milia sestertium = 100 × 100 000 HS = 10 000 000 HSn soit nos 10 millions.

Pour les autres cas, la règle est : les adjectifs distributifs s'emploient dans les multiplications et sont multipliés par l'adverbe numéral.

Bis bina sunt quattuor = 2 × 2 = 4.
Decies bina sunt viginti = 10 × 2 = 20.
Bis dena sunt viginti = 2 × 10 = 20.
Decies centena milia = 10 ×100 000 = 1 million.

Car pour chiffrer au-delà des centaines de milliers, les Romains devaient passer à la multiplication des centena (milia) par l'adverbe numéral. Tant que l'on ne va pas au million, la règle reste sans multiplication ; ainsi, 999 999 citoyens s'écrit nongenta nonaginta novem milia nongenti nonaginta novem cives. Le premier nongenta est neutre puisque accordé à milia ; le second nongenti est masculin, accordé à cives.

Autre exemple chez Tacite (Annales, XI, 25) relatif au recensement fait par Claude : « Condiditque lustrum quo censa sunt ciuium quinquagies nouies centena octoginta quattuor milia septuaginta duo ». Cela se traduit par « Et il clôt le quinquennat où furent recensés cinq millions neuf cent quatre-vingt-quatre mille soixante-douze citoyens (5 984 072) ».

On lit en effet :
quinquagies nouies centena = 59 × 100 000 = 5 900 000.
octoginta quattuor millia = 84 000.
septuaginta duo = 72.
Total = 5 984 072.

Caligula répondant à Iulia.

 

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